Les Etats-Unis confirment leur retour en force sur la planète pétrole
mercredi 13 mars 2019, source : Les Echos
Les Etats-Unis produiront près de
14 millions de barils de brut par jour
dans cinq ans, un niveau qui n’a
jamais été atteint par aucun autre
pays dans l’histoire. Le rapport
annuel sur le pétrole de l’Agence
internationale de l’énergie (AIE),
publié lundi, confirme le retour en
force du pays sur le marché du
pétrole. D’ici à 2024, les capacités de
production américaines vont augmenter
d’un peu plus de 4 millions
de barils, ce qui représentera plus
des deux tiers de l’accroissement
des volumes mondiaux. L’essentiel
proviendra du Bassin permien, une
vaste région pétrolière située dans
l’ouest du Texas et au Nouveau-
Mexique. Déjà premier producteur
mondial depuis peu, les Etats-Unis
creuseront ainsi leur avance sur la
Russie et l’Arabie saoudite, numéros
deux et trois mondiaux avec des
volumes qui plafonneront entre 11
et 12 millions de barils chacun à cet
horizon. « Les Etats-Unis continueront à
dominer la croissance de l’offre sur le
moyen terme », relève l’Agence.
Cette progression est d’autant plus
marquante que la consommation
intérieure de pétrole des Etats-Unis,
elle, stagne. Autrement dit, les volumes supplémentaires seront intégralement
destinés à l’exportation.
La première puissance mondiale
deviendra exportatrice nette à partir
de 2021, pour la première fois
depuis le milieu du XXe siècle. Les
exportations brutes atteindront
9 millions de barils dans cinq ans,
« dépassant la Russie et rattrapant
l’Arabie saoudite ». L’industrie
investit massivement dans les pipelines
et dans les terminaux d’exportation
sur la côte texane, où des
navires géants transporteront la
précieuse marchandise aux quatre
coins de la planète. Le pétrole est
aussi, de plus en plus souvent,
transformé sur place, en carburants
ou en produits chimiques. « Le déficit commercial
va s’évaporer »
« L’impact politique et économique
de ce tournant pour le commerce
mondial a déjà été énorme et il sera
encore plus central au cours des cinq
prochaines années, écrit Per
Magnus Nysveen, analyste du cabinet
Rystad Energy, dans une note
publiée la semaine dernière. Le déficit
commercial des Etats-Unis va
s’évaporer et la dette extérieure sera
remboursée rapidement grâce à la
croissance rapide des exportations de
pétrole et de gaz. » Pour les pays
acheteurs, ce bouleversement va
« renforcer la sécurité d’approvisionnement
en pétrole », estime l’AIE.
Les grands importateurs, en particulier en Asie, où la demande progresse
le plus vite, auront « un choix
plus large de fournisseurs » grâce à
cette « saine concurrence ».
Le rythme de l’expansion américaine
« n’est pas totalement certain
», tempère l’AIE, car il dépendra
en partie de l’évolution du prix
du baril. Les acteurs indépendants
du schiste réagissent très rapidement
aux variations. Ils ont ainsi
réduit leurs investissements ces
derniers mois face au recul des
cours. Or le schiste exige constamment de nouveaux forages – et donc
de nouvelles dépenses – pour compenser
le déclin rapide du rendement
des puits (les volumes extraits
peuvent chuter de 70 % dès la première
année d’exploitation).
Mais les réserves sont gigantesques
– 155 milliards de barils, soit
35 années de production au rythme
actuel –, et elles ne cessent d’être
réévaluées à la hausse. En outre, les
producteurs spécialisés dans le
schiste ont considérablement
abaissé leur point mort ces dernières
années : les puits sont rentables
avec un baril compris entre 30 et
40 dollars (à comparer avec un
cours de 56 dollars aujourd’hui
pour le WTI), et même à 20 dollars
pour les champs les plus prolifiques,
selon les estimations de Rystad
Energy. Une autre évolution
récente plaide pour une croissance
continue : les majors comme
Exxon, Chevron, Shell et BP investissent désormais massivement
dans le schiste américain. Leur
puissance financière laisse augurer
une moindre sensibilité du secteur
aux cycles à l’avenir.
Face à cette formidable montée
en puissance, les capacités de production
de l’Opep vont légèrement
diminuer au cours des cinq prochaines
années, prévoit l’AIE. Seuls l’Irak
et les Emirats arabes unis ont
annoncé des programmes d’expansion
significatifs. Ils compenseront à
peine le déclin de la production en
Iran, pénalisé par les sanctions américaines,
et au Venezuela, en proie
au chaos politique et économique.
Quant à l’Arabie saoudite, seul pays
qui dispose de capacités de production
inutilisées, elle a choisi depuis
longtemps de « stabiliser, plutôt que
d’augmenter » ses volumes, souligne
l’Agence, afin de ne pas déséquilibrer
le marché mondial, ce qui ferait
chuter les cours.
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