Tout heureux du recul des incertitudes, les cambistes pariaient en début d’année sur un affaiblissement du billet vert. Ils ont très rapidement déchanté avec l’escalade des tensions entre les Etats-Unis et l’Iran, qui a poussé les investisseurs vers les valeurs refuges, telles que les bons du Trésor américain, l’or et le dollar. La crise sanitaire a, bien sûr, exacerbé le climat d’incertitude, propulsant en quelques semaines le dollar à un plus-haut depuis deux ans et demi face à l’euro, à 1,08 $. Depuis 2018, les marchés pariaient immanquablement sur un rebond de la monnaie unique : son évolution n’a eu de cesse de leur donner tort. Il faut dire que la faiblesse de la zone euro, et tout particulièrement de sa première économie, l’Allemagne, aux prises avec le ralentissement de ses exportations et de son moteur industriel, y a été pour beaucoup. La détérioration s’est prolongée en décembre avec une baisse encore plus marquée que prévu de la production industrielle en zone euro. Sur un an, elle a reculé de 4,1 %, sa plus faible performance depuis 2012, en pleine crise des dettes souveraines. Le dollar est aussi en forte hausse par rapport aux autres monnaies. Très liées à la Chine, les devises émergentes paient un lourd tribut à la crise. Cette évolution n’est pas sans poser de difficultés à la Réserve fédérale, qui comptait rester inactive tout au long de 2020. Les Etats-Unis devraient en effet eux aussi subir les conséquences économiques de l’épidémie. Et la vigueur du dollar, qui défavorise les exportations américaines, s’ajoute à cette nouvelle difficulté. Désormais, les investisseurs s’attendent donc en majorité à une baisse du taux directeur de la Réserve fédérale en juillet, voire même en juin. La baisse du loyer de l’argent aux Etats-Unis pourrait en effet pousser les cambistes à s’intéresser enfin à d’autres monnaies plus rentables. Difficile d’être la première économie mondiale.