Le spectre de l’inflation fait son grand retour sur les marchés
lundi 01 mars 2021, source : Investir, le Journal des Finances
Anticipations Avec la reprise, les investisseurs craignent que les relances monétaires et budgétaires ne
finissent par provoquer une envolée des prix. Mais ce scénario pèche par son manque de ressorts structurels.
Si les craintes de déflation
ont longtemps hanté les
années qui ont suivi la
crise de 2008, il aura
fallu une fraction de seconde
pour que la dernière récession
voie jaillir son redoutable pendant,
l’inflation. Il faut dire que les
moyens employés par les banques
centrales et les gouvernements
pour soutenir les
économies ont pris cette fois une
telle ampleur que nul ne saurait
avec exactitude en évaluer les
conséquences. Difficile d’imaginer
le déploiement d’un tel soutien
sans avoir, un jour, à en payer
le prix.
HAUSSE DES RENDEMENTS
Alors que la reprise se dessine,
avec le développement plus ou
moins rapide des campagnes de
vaccination à travers le monde,
les investisseurs tissent chaque
jour le scénario d’une remontée
de l’inflation. Elle se lit avant tout
sur les marchés obligataires, où
les rendements ont flambé ces
dernières semaines. Plus exactement,
les tensions sur les taux des
emprunts d’Etat américains ont
démarré en janvier, lorsque les
démocrates ont remporté la
majorité au Sénat, renforçant les
perspectives d’une puissante
relance fiscale. De 0,9 % en début
d’année, les taux des obligations
souveraines à dix ans aux Etats-
Unis sont passés à 1,4 % ces derniers
jours, soutenus par la
montée en puissance des anticipations
d’inflation. Davantage
que le niveau atteint, c’est la rapidité
du mouvement qui a retenu
l’attention.
Au Royaume-Uni, ces taux sont
déjà bien partis pour afficher leur
plus forte hausse trimestrielle
depuis 2013. En Australie, la
banque centrale a repris ses
achats d’actifs pour apaiser les
tensions (il ne faudrait pas que
cette hausse des taux freine la
reprise), et, en Europe, Christine
Lagarde a indiqué que la situation
était « surveillée de près ».
FACTEURS TRANSITOIRES
Du reste, les dernières statistiques
montrent une hausse
contenue mais bien réelle des
prix. Aux Etats-Unis, l’inflation
est passée de 0,2 % sur un an en
mai dernier à 1,4 % en janvier.
Dans la zone euro, elle a été
confirmée à 0,9 % en janvier, un
plus-haut depuis onze mois,
après – 0,3 % en décembre.
Reste que cette poussée est
surtout liée à des ressorts transitoires.
Non seulement l’effet de base y
est pour beaucoup, mais les baisses
de TVA en Allemagne ont
pris fin en décembre. Or c’est
surtout la hausse des prix outre-
Rhin qui explique la progression
dans la zone euro. Autre raison,
la reprise mondiale et les pénuries
engendrées par la pandémie
ont fait grimper le cours des
matières premières. Depuis octobre
dernier, l’indice CRB de
l’ensemble des matières premières
dans le monde a ainsi bondi de
26 %. En janvier, les prix de l’énergie
à la consommation ont grimpé
de près de 4 % sur un mois, au
rythme le plus élevé depuis septembre
2000.
MATIÈRES PREMIÈRES
Or, « pour ne parler que du pétrole,
n’oublions pas que l’offre mondiale
d’or noir reste et restera encore pour
longtemps supérieure à la demande,
réduisant par là même les risques de
pénurie à venir. Autrement dit, si un
baril à 60 $ paraît justifié pour
2021, un baril durablement supérieur
à 80 $ semble exclu », explique
Marc Touati, économiste
chez Spectrum Markets. Quant à
l’effet « soldes » sur les prix, il ne
s’est pas produit en janvier, ces
derniers ayant été décalés. Enfin,
le changement du panier de biens
de consommation cette année
s’est effectué, selon Eurostat, au
détriment des secteurs les plus
touchés par la crise et les plus
déflationnistes.
De façon générale, les économistes
s’accordent à dire que les tensions
sur le marché du travail ou
sur les capacités de production ne
risquent pas de se produire, ni à
court ni à moyen terme. Résultat :
si l’inflation risque fort de dépasser
la zone de confort de 2 % dans
un certain nombre de zones géographiques
cette année, il est fort
peu probable qu’elle s’installe
durablement à un niveau élevé.
« Probablement à un pic de 2 % dans
les prochains mois, l’inflation dans
la zone euro devrait être en
moyenne de 1,4 % cette année et l’an
prochain », estime ainsi Maddalena
Martini, économiste chez
Oxford Economics.
- CAROLINE MIGNON
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